En arrivant à la Ensenada, on a une impression d’amélioration du quartier (pour ceux qui le connaissent …) : rues bitumées, et donc un peu moins de poussière, maisons en matériel solide, parfois de plusieurs étages, plus de transports (de nouvelles lignes de bus plus rapides, des mototaxis …), eau courante, donc c’est positif car cela signifie que la situation de certaines personnes évolue ….. Mais quand on s’éloigne du centre pour aller sur les flancs de collines, c’est toujours la même chose : maisons précaires de plus en plus haut perchées, pas d’eau courante, pas d’électricité … souvent d’ailleurs ces habitants sont les enfants du quartier qui, devenus adultes, construisent leur nouveau foyer …

Des nouvelles des promotrices de santé …

Actuellement elles sont 4 promotrices : Lucia (la coordinatrice,56 ans ) Lucila (54 ans) , Blanca ( 52 ans) , et Cécilia (42 ans , qui fait l’artisanat de cuir) .

Elles assurent 2 activités : la pharmacie populaire dit « botiquin », et la rééducation dite « thérapie physique et du langage ».

L’activité « pharmacie populaire » est en baisse et cela depuis plusieurs années, plusieurs raisons à cela :

-une évolution positive du système de santé péruvien : le centre de santé public dispose maintenant des médicaments essentiels, à bas prix, de plus les gens bénéficient du SIS (genre de CMU) qui leur permet de bénéficier de certains médicaments gratuitement….

-le centre de santé est éloigné du botiquin, ce qui ne facilite pas les échanges.

Cependant les promotrices restent attachées au botiquin, il est un lieu où l’on vient parler de ses problèmes, demander conseil ; elles continuent donc d’assurer des permanences matin et soir de 10h 30 à 12h30 et de 18h à 21h.

La rééducation

Cette activité est née de la préoccupation des promotrices de santé qui s’étaient rendues compte que rien n’existait sur le quartier en terme de rééducation alors que les besoins étaient importants tant pour les enfants que pour les adultes. Elles se sont démenées et ont réussi à convaincre des kinés de Lima de venir bénévolement une fois par semaine à la paroisse… C’est ainsi que Milagros , la kiné actuelle, a commencé il y a maintenant 12 ans…Puis , pour répondre à la demande et aussi pour une meilleure efficacité des soins, est venue l’idée d’augmenter la fréquence des séances de kiné et d’y associer l’orthophonie, 3 fois par semaine … demande à laquelle l’association a répondu positivement en s’engageant à financer le salaire de la kiné et de l’orthophoniste. Les promotrices reçoivent une indemnité mais qui est très minime et qu’il serait souhaitable d’augmenter.

Progressivement, Milagros a formé les promotrices, elles réalisent maintenant certains soins, toujours sous sa responsabilité et selon ses consignes…et c’est vrai qu’elles le font avec enthousiasme, cela fait plaisir à voir ! Ainsi elles peuvent accueillir plusieurs personnes en même temps … dans la salle il y a d’ailleurs une très bonne ambiance et les gens échangent entre eux …J’ai reçu plusieurs témoignages de personnes qui disent qu’ici on prend le temps de s’occuper d’eux, qu’on est gentil avec eux. J’ai remarqué aussi que les patients sont volontaires et font d’eux-mêmes les exercices qui leur ont été indiqués avant.

Exemple d’une séance de kiné, pour ceux qui souffrent du dos : çà démarre par l’application du chaud, ensuite une stimulation par électrodes électriques, puis les massages et enfin les exercices d’étirement, en tout une demi-heure de soins.

En tout de 10 à 15 personnes (une moyenne de 150 par mois), reçues de 15h à 18h voire 19h .

Pour quelles pathologies ?

Quelques enfants : trisomie, retard mental, problèmes de marche ...

mais surtout des adultes : beaucoup avec problèmes de dos (à la Ensenada beaucoup de personnes ont un travail dur physiquement), des personnes hémiplégiques, (4 cas actuellement en différents stades) qui viennent pour de longues périodes, des personnes âgées avec de l’arthrose ….

L’orthophonie

Les séances, d’une demi-heure, sont assurées par Claudia, une jeune orthophoniste récemment arrivée, la précédente ayant repris des études. Elle utilise différents supports, et elle implique les familles : elle leur explique les exercices à faire, demande comment çà s’est passé. Elle utilise un cahier avec des indications, des dessins. Ce cahier est repris à chaque séance. A chaque nouvelle prise en charge elle fait un bilan avec la famille. Un seul regret, elle n’implique pas les promotrices de santé qui n’ont qu’un rôle d’accueil alors que l’orthophoniste précédente le faisait... Peut –être n’est-elle pas encore assez à l’aise ? En tous cas elles vont essayer d’y remédier car c’est dans l’esprit de ces thérapies.

En moyenne elle voit de 8 à 10 patients par après midi. Selon les pathologies elle en voit plusieurs à la fois. Ce sont essentiellement des enfants : trisomie, retard mental, bégaiement, mais aussi quelques adultes aphasiques.

Le fait que la fréquence des séances soit passée à 3 fois par semaine permet une meilleure prise en charge des patients (avant c’était trop juste) et pour certains, le fait d’associer l’orthophonie et la kiné leur permet progresser considérablement.

L’équipe n’a pas le temps de faire les visites à domicile …elles parlent de relancer cela …d’essayer de voir si des enfants des nouveaux quartiers n’auraient pas besoin de soins.

Chaque patient paie 2 soles par séance (0,54 €) et 3 soles pour la 1ère fois

Cet argent permet de payer les charges : gaz, électricité, piles des appareils, eau … et aussi d’acheter un peu de matériel.

Ailleurs une séance de kiné coute en moyenne 15 soles (4,05 €)

Le matériel est simple : 3 lits d’examen, des barres, un vélo , des déambulateurs, du matériel pour le travail des bras , des ballons …une gazinière pour chauffer le matériel .

Il manque surtout de place !

Les cantines : « comedores »

L’association finance les repas de 110 personnes reparties comme suit :

45 enfants de 4 à 14 ans mangent au comedor INABIF qui est soutenu par l’état

Ils servent petit-déjeuner, déjeuner , gouter.

La nourriture est bonne et bien équilibrée, le menu est fait par une diététicienne : soupe, plat de résistance, fruit, laitage, tisane .

Les enfants sont encadrés : ils se lavent les mains avant d’aller manger. Les locaux sont propres.

De plus une animatrice s’occupe de l’aide au devoir et organise des jeux selon les niveaux ce qui évite que les enfants soient livrés à eux mêmes dans la rue.

On constate moins de cas d’enfants dénutris (ou sont-il dépistés ??) il s’agit davantage d’enfants à risques sociaux : enfants en danger car restant seuls à la maison, ou dans la rue, enfants dont les parents sont malades (beaucoup de maladies mentales, tuberculose…) ou peu de revenus, familles nombreuses (exemple pour une famille de 5 enfants, la paroisse en aide 2) problème avec le beau père ….

Ce comedor présente l’avantage d’être un mini internat : les enfants sont pris en charge soit toute la matinée soit tout l’après midi (les petits sont à l’école le matin et les grands l’après midi) …Par contre on ne sait pas si le nouveau gouvernement de Humala va reconduire la formule.

65 personnes reçoivent leurs repas dans les comédores de quartier (en tout 6), mais ne mangent pas sur place. Il y a quelques enfants : des enfants fortement handicapés qui ne peuvent pas se déplacer. Sinon ce sont des adultes malades (maladies psychiatriques, l’assistante sociale évoque beaucoup la schizophrénie…) et des personnes âgées sans ressources, des personnes temporairement en difficulté sociale.

Les comedores de quartier ont beaucoup changé, ils ne cuisinent plus en grosses quantités : en moyenne 30 à 40 repas par jour (alors qu’à la « belle époque » c’était par centaines !)

Prix des repas = 1,5 sol( 0,4 €) pour les adhérents ; la paroisse verse 0,90 sol ( 0,25 €) et la cantine complète au titre de son engagement d’aide sociale exigée par l’organisme d’état qui leur verse une subvention et des aliments.

L’assistante sociale de la paroisse va voir chaque famille avant toute prise en charge et fait son enquête sociale. C’est une nouvelle AS, jeune, mais qui connaît bien les quartiers. A son arrivée, elle a rendu visite à toutes les personnes prises en charge et revu les listes d’enfants et de familles, et essaie que l’aide soit rotative.

Elle a commencé à faire des charlas (cours) une fois par mois pour les parents. Thèmes abordés :

Recherche de travail, orientation des enfants, contrôle de la natalité, orientation personnelle et estime de soi.

Christine

La Ensenada septembre 2011